Racisme, néoracisme et antiracisme

2024-05-06
Ajout de la méritocratie, 2024-05-13

Ce blogue est tiré de la présentation « Universalisme et anti-universalisme » que j’ai faite le 27 avril 2024, lors du Forum de l’Association des Québécois unis contre le racialisme (AQUR), sur l’universalisme, « Penser le vivre-ensemble québécois au XXIe siècle », tenu à la Grand Bibliothèque, Montréal.

Summary in English This blog is available in English: Racism, Neoracism and Antiracism

Influencés par le postmodernisme et le relativisme culturel, la post-gauche rejette l’universalisme et voit le monde comme un ensemble de groupes, chacun avec ses propres intérêts et sa propre « vérité », souvent inconciliables avec ceux et celle des autres groupes. Ainsi, les intérêts et sentiments du groupe (réels ou présumés) priment sur l’objectivité, conduisant à une survalorisation de l’émotion et à une censure sociale de propos jugés « offensants » à l’égard d’un groupe perçu comme cible d’injustice.

À l’époque du colonialisme européen, les Européens se considéraient le centre de l’univers, ayant le devoir de civiliser le reste du monde. Aujourd’hui, la post-gauche continue de placer la civilisation européenne au centre de l’univers, mais ce centre est désormais prétendument pourri, imposant toutes les formes d’oppression. Cette dernière attitude n’est que le revers de la première. Et le racisme et le néoracisme sont eurocentriques. Les deux sont fausses. Les deux sont néfastes.

Racisme classique
européen
Néoracisme
(prétendu « antiracisme »
de la post-gauche)
Antiracisme
Eurocentrisme :
Europe = la plus haute civilisation
Eurocentrisme :
Europe = origine de tous les maux
Universalisme
Préjugés contre certains groupes Préjugés contre certaines majorités, surtout les « blancs » Daltonisme
Tribalisme basé sur la pseudoscience Multi-tribalisme basé sur le postmodernisme L’identité raciale, un attribut parmi tant d’autres
Exagération des différences génétiques
Classement hiérarchique
Obsession de l’identité « raciale »
Racialisation de l’identité religieuse
Une seule « race » humaine
Respect de la liberté de conscience
Discrimination contre les groupes « inférieurs » Toute inéquité serait le résultat d’injustice
Discrimination positive
Anti-discrimination
Méritocratie

Selon le racisme classique européen, l’Europe serait l’origine de la plus haute civilisation. Ce racisme constitue un tribalisme rationalisé par la pseudoscience, par exemple la pseudoscience raciale nazie. Ce racisme exagère les différences biologiques entre groupes dits « raciaux » et fait un classement hiérarchique de ces groupes.

Pour les néoracistes de la post-gauche, qui se prétendent faussement anti-racistes, l’Europe demeure le centre de tout, mais elle est maintenant l’origine de tous les maux, de toutes les oppressions. Le néoracisme véhicule des préjugés contre certains groupes considérés dominants, surtout contre la majorité dite « blanche ». Les néoracistes sont obsédé par l’identité raciale, dont ils exagèrent l’importance. Toutefois, ils n’ont aucune définition claire, ni de la « race » ni du « racisme », permettant ainsi de racialiser l’appartenance religieuse. Pour eux, toute inéquité doit être le résultat d’injustices et leur solution est la discrimination positive en faveur des groupes « opprimés » ou « marginalisés ».

Finalement, une approche antiraciste authentique, c’est-à-dire universaliste, favorise le daltonisme en matière de couleur de la peau et considère que l’identité raciale de l’individu n’est qu’un attribut parmi tant d’autres. On reconnaît l’aspect inné de la « race », mais reconnaît aussi que tous les humains appartiennent à la même « race ». On respecte la liberté de conscience. Les antiracistes universalistes s’opposent à la discrimination et favorisent la méritocratie.


La post-gauche nie l’existence, voire la possibilité, du racisme anti-Blancs, tout en le pratiquant. Pour la post-gauche, le racisme est toujours à sens unique : ce sont toujours les Blancs qui sont racistes et ce sont toujours les non-Blancs qui sont les cibles de ce racisme.

Donc la post-gauche refuse de reconnaître le préjugé anti-Québécois, un thème majeur de l’histoire du Canada et un aspect important de l’opposition à la laïcité québécoise. Après tout, les Québécois ne sont que des Blancs!

La post-gauche néglige aussi le danger que l’antisionisme dérive vers l’antisémitisme. Après tout, les Juifs ne sont que des Blancs.

La post-gauche refuse aussi de reconnaître le racisme anti-Noirs et l’esclavagisme chez les arabo-musulmans. Car, selon les dogmes post-gauche, les non-Blancs ne peuvent être racistes !


Prochain blogue : Racism, Neoracism and Antiracism

Le « wokisme » n’est pas une panique morale

2022-10-14, Autres liens ajoutés 2022-10-19

Non, la mouvance « woke » n’est pas une panique morale inventée par la droite.

Summary in English No, the “woke” phenomenon is not some moral panic invented by the political right. This blog is available in English under the title “Wokism” is Not a Moral Panic.

Pendant plusieurs années, des termes tels que « Social Justice Warrior » (« SJW ») et « woke » ont été utilisés par de nombreux membres de cette mouvance eux-mêmes, pour s’identifier. Au fil du temps, le mot « woke » est devenu courant et, alors que les critiques du « wokisme » commençaient à l’utiliser de manière négative, le mot a acquis des connotations péjoratives. (Soulignons que ces critiques fusent de toutes tendances politiques : des marxistes, du centre, des gens de droite, etc.)

Maintenant, certains prétendent même que le « wokisme » n’existerait pas, que ce n’est qu’un fantasme de droite, une « panique morale » inventée par la droite politique afin de dénigrer la gauche. Cette allégation est fausse et malhonnête. Les « woke » eux-mêmes ont adopté le mot bien avant tout le monde. Non seulement le « wokisme » est un phénomène réel mais, plus important encore, il est idéologiquement distinct de la gauche politique classique, c’est-à-dire universaliste.

Qu’est-ce que le « wokisme » alors ? C’est une mouvance sociale qui se prétend de gauche et se targue de lutter pour la justice sociale et contre divers préjugés, surtout le racisme. Mais les assises philosophiques du phénomène « woke » sont fortement influencées par le postmodernisme et par le rejet des valeurs des Lumières, en particulier le rejet de l’universalisme. Son rejet les Lumières représente l’abandon du plus bel accomplissement de la civilisation européenne.

Par conséquent, cette mouvance défend très mal les minorités dont elle fait son obsession. Elle finit par attiser le racisme autant qu’elle lutte contre. C’est-à-dire que cette mouvance est néoraciste. Moi, je l’appelle la post-gauche ou la pseudogauche anti-Lumières.

Les « wokes » ont la méchante habitude de lancer des accusations de « fascisme » contre tout ce qui ne serait pas d’accord avec eux. C’est très ironque — et hypocrite — car le wokisme et l’extrême droite ont quelque chose de très significatif en commun : le rejet des Lumières.

Les excès et les folies des « wokes » constituent un vrai cadeau pour la droite politique, car celle-ci s’en sert pour dénigrer toute la gauche, comme si cette gauche ne comprenait que les « wokes » — ce qui est faux, car la vraie gauche, c’est la gauche universaliste.

Pour une présentation plus étoffée du « wokisme », voir :


Autres liens


Prochain blogue : “Wokism” is Not a Moral Panic